Page:Ovide - Œuvres choisies (trad. Panckoucke), Les Amours, 1858.djvu/342

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de mille ruisseaux. Tâche que ta belle s’habitue à toi : rien n’a plus de force que l’habitude. Pour gagner son cœur, ne recule devant aucun ennui. Que sans cesse elle te voie ; qu’elle n’entende que toi. Le jour, la nuit, sois devant ses yeux. Mais, lorsque tu pourras croire avec plus de confiance qu’elle peut te regretter, alors éloigne-toi, pour que ton absence lui donne quelque inquiétude. Laisse-lui un peu de repos ; le champ qu’on laisse reposer rend avec usure la semence qu’on lui confie, et une terre aride boit avec avidité les eaux du ciel. Tant que Phyllis eut Démophoon près d’elle, elle ne l’aima que faiblement ; dès qu’il eut mis à la voile, sa passion la consuma. L’adroit Ulysse tourmenta Pénélope par son absence, et tes pleurs, ô Laodamie ! appelaient le retour de Protésilas.

Mais pour plus de sûreté, que ton éloignement ne se prolonge pas : le temps affaiblit les regrets. L’amant qu’on ne voit plus est vite oublié : un autre prend sa place. En l’absence de Ménélas, Hélène s’ennuya de sa couche solitaire et alla se réchauffer dans les bras de son hôte. Quelle sottise fut la tienne, Ménélas ! Tu pars seul, laissant sous le même toit ton épouse avec un étranger. Insensé ! c’est livrer la timide colombe à la