Page:Ovide - Œuvres complètes, trad Nisard, 1838.djvu/627

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

qui la nuit a été sans sommeil, dépose son flambeau à demi consumé, et que le villageois retourne à ses travaux accoutumés, les Pléiades commencent à soulager de leur poids les épaules paternelles. [4, 170] Nous disons les sept Pléiades, et pourtant nous n'en voyons que six, soit parce qu'il n'y en eut que six honorées des embrassements des dieux. Stéropé, en effet, reçut Mars dans son lit; Alcyoné et la belle Céléno s'unirent à Neptune; Maïa, Électre et Taygète à Jupiter; [4, 175] Sisyphe, simple mortel, épousa Méropé, la septième; elle en rougit, et déroba sa honte à nos regards; ou bien peut-être est-ce Électre, qui, ne pouvant supporter le spectacle de l'incendie de Troie, mit sa main sur ses yeux, pour s'épargner cette douleur.

Laissons le ciel tourner trois fois sur son axe éternel; [4, 180] que le soleil attelle et dételle trois fois ses coursiers, et alors on entendra résonner la flûte recourbée du Bérécynte: c'est la fête de la mère des dieux, de la déesse de l'Ida; on verra marcher le cortège des prêtres mutilés, frappant leurs tambours; la cymbale d'airain tintera sous le choc de la cymbale; [4, 185] la déesse elle-même, portée sur les épaules de ses ministres efféminés, parcourra les rues de la ville au milieu des hurlements consacrés. La scène a retenti, les jeux sont ouverts; regardez, ô Romains! suspendez vos procès, ces batailles du Forum.

J'ai plus d'une question à faire; mais les sons aigus de l'airain, [4, 190] et le bruit terrible du lotus recourbé me remplissent de trouble. Permets-moi, ô Cybèle, d'interroger tes doctes filles. Cybèle m'entend, et leur commande de venir à mon secours. Fidèles à cet ordre, ô nymphes de l'Hélicon, révélez-moi quel charme ce bruit continuel peut avoir pour la grande déesse. [4, 195] Je dis; Érato, qui a des droits sur le mois de Cythérée, puisqu'elle a emprunté son nom au tendre amour, me parla en ces termes: "Saturne ayant un jour consulté le Destin reçut cette réponse: "O le meilleur des rois! tu seras détrôné par ton fils." Le dieu dévore ses enfants, objets de sa terreur, [4, 200] à mesure qu'ils voient le jour, et les tient ensevelis au fond de ses entrailles. Souvent Rhéa se plaignit d'enfanter tant de fois sans jamais être mère, et déplora sa fécondité; mais Jupiter naquit. Ajoutons foi ici à l'imposant témoignage de l'antiquité, et gardons-nous d'attaquer la croyance reçue.

[4, 205] "Une pierre, cachée dans des langes, descendit dans les entrailles du dieu; il fallait qu'il fût trompé pour que le destin s'accomplît; cependant mille bruits retentissent sur les cimes élevées de l'Ida, pour que les vagissements de l'enfant ne puissent le trahir; [4, 210] d'un côté les Curètes, de l'autre les Corybantes frappent avec des bâtons des casques et des boucliers. Ainsi furent détournés les soupçons de Saturne, et c'est pour rappeler cette ruse antique que les prêtres de la déesse frappent l'airain et les