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OVIDE
Tel que j’étais alors, mon vif tempérament

D’aucun scandale ne fut cause.
Presque enfant, j’épousai femme indigne de moi,
Union triste et sans durée.
L’épouse qui suivit, bien que considérée,
Sut peu de temps garder ma foi.
La dernière est ce cœur qui, jusqu’en la vieillesse,
Soutient le poids de mes revers.,
Ma fille m’a rendu, par deux maris divers,
Deux fois grand-père en sa jeunesse.
À quatre-vingt-dix ans, mon vieux père acheva
Aux doigts des Parques sa carrière.
Je le pleurai comme il m’eût pleuré. De ma mère
Bientôt le bûcher s’éleva.
Ah ! bienheureux tous deux, morts à temps, sans alarmes,
Ils n’ont pas vu mon sort affreux.
Heureux moi-même aussi d’être seul malheureux
Et de leur épargner des larmes.
S’il reste cependant des morts plus qu’un vain nom,
Si du bûcher s’envole une ombre,
Ombres de mes parents, si mon châtiment sombre,
Vous frappant, émut l’Achéron,
Sachez qu’il eut pour cause, et certe il faut me croire,
Non un crime, mais une erreur.
Adieu, Mânes chéris !.. — Je retourne au lecteur
Qui veut la fin de cette histoire.
Déjà la main du Temps chassant mes plus beaux jours,