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Page:Ovide - Les Amours, traduction Séguier, 1879.djvu/66

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OVIDE

Feigne des pleurs, te pousse à bout.
Toi, l’accusant de torts aisément réfutables,
Détourne alors la vérité.
À ce prix, les honneurs, les cadeaux profitables,
Puis ta complète liberté.

Traîtres et délateurs, chargés de fers, languissent
Au fond des cachots, tristement.
Tantale a soif dans l’eau, de ses mains les fruits glissent ;
Sa langue a causé ce tourment.
Argus, tyran d’Io, tombe à la fleur de l’âge ;
Io, délivrée, est aux cieux.
D’un inceste j’ai vu châtier avec rage
Le rapporteur audacieux.
Certe il méritait plus, car il fit deux victimes,
Femme avilie, époux en deuil.
Un mari n’aime pas le récit de tels crimes :
Sévère, en tout cas, est l’accueil :
S’il reste indifférent, la plainte est inutile ;
Épris, il vous doit son malheur.
D’ailleurs, malgré les faits, prouver n’est pas facile :
Belle a son juge en sa faveur.
Eût-il tout vu lui-même, il la croira fidèle,
Condamnant son propre regard ;
Et si la dame pleure, il pleurera comme elle,
En s’écriant : « Sus au bavard ! »
Duel inégal ! Vaincu, tu subis mille outrages,
Tandis qu’elle, on va l’embrassant.