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vii
PRÉFACE.

viaient à goûter de paisibles loisirs, qui toujours eurent pour lui mille charmes. » Il cultiva, il chérit les poètes de son époque : Properce lui lisait ses élégies ; Horace charmait ses oreilles en chantant sur la lyre ausonienne ses odes harmonieuses ; il entrevit seulement Virgile, et Tibulle fut trop tôt ravi à son amitié. Malgré cette complaisance qu’on lui reproche pour les fruits de sa muse, il paraîtrait cependant que, dans les commencements du moins, Ovide chercha à combattre la facilité de son esprit. « Je composai, nous dit-il, bien des pièces ; mais celles qui me parurent trop faibles, je ne les corrigeai qu’en les livrant aux flammes. » Dans la société des poètes illustres que nous avons nommés, le talent d’Ovide se développa rapidement.

Les Héroïdes furent son début. Les Héroïdes sont en quelque sorte le résumé de la légende amoureuse de l’antiquité ; on y entend soupirer toutes les tendresses légitimes et non légitimes : Pénélope à côté d’Ariadne, Canacé et Sapho ; mélange un peu risqué, jeu de l’esprit plutôt qu’émotion du cœur, et où l’ironie semble prendre plus d’une fois la place de la passion.

Les trois livres des Amours succédèrent aux Héroïdes. Ces trois livres, qui d’abord en formaient cinq, comme nous l’apprend l’épigramme qu’Ovide a mise en tête de ce recueil, sont une œuvre spontanée, une image fidèle et vive des impressions personnelles du poète, de ses joies, de ses douleurs, de ces caprices de l’âme et de l’imagination, de ces émotions délicates et fugitives qui souvent, sans cause, font le désespoir ou le bonheur des amants ; thème léger et monotone que l’esprit vif et souple du poète sait varier et enrichir par mille détails charmants, et répéter sans l’épuiser jamais. Dans les Amours, Ovide est plein de grâce, de naturel et de facilité. L’abus de l’érudition, qui, dans les Héroïdes, trop souvent gâte et refroidit le sentiment, ici ne vient pas l’altérer en le rendant prétentieux et faux, en