Page:Ozanam - Œuvres complètes, 2e éd, tome 01.djvu/334

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philosophie, tu as goûté au miel des lettres attiques. Où sont les affaires quand tu lis Démosthènes ou Cicéron, quand tu relis Xénophon, Platon, Caton, Varron, et tant d’autres dont je ne sais pas même les noms, et dont tu sais les livres entiers ? Pour te livrer à eux, tu es libre et maître de toi. S’il s’agit de connaître le Christ, c’est-à-dire la sagesse de Dieu, tu es esclave des affaires ; tu trouves le temps d’être philosophe et tu ne le trouves pas d’être chrétien. Change plutôt de pensées, porte ailleurs ton éloquence ; car on n’exige point que tu abdiques la philosophie, pourvu que tu la consacres par la foi, et que, l’unissant à la religion, tu en fasses un plus sage emploi. Sois le philosophe de Dieu, le poëte de Dieu, empressé non plus de le chercher, mais de l’imiter. Mets ta science dans ta vie plus que dans tes paroles, et fais de grandes choses au lieu de grands discours[1]. » Voilà le langage mâle et ferme qu’il fallait tenir à ces générations amollies, à ces générations de gens d’esprit, à ces générations d’hommes sensibles et impuissants qu’il fallait précipiter de force, en quelque sorte, dans les saintes et fécondes austérités de la foi.

À la fin, cependant, ces efforts furent bénis ; de bonne heure on commence à voir un certain nombre d’âmes plus fortes qui ont le courage de s’enfoncer dans ces mystères, où elles trouveront la récompense de leur héroïsme : ce sont d’abord Quadratus, Athénagore, saint

  1. S. Paulin, Ep. XVI, 6.