Page:Ozanam - Œuvres complètes, 2e éd, tome 01.djvu/353

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l’ordre moral il a appris à pardonner beaucoup aux volontés humaines, il apprend aussi à permettre beaucoup aux intelligences[1].

Voyons maintenant quelle était à ce sujet la doctrine de saint Augustin, quel fut le travail d’esprit dont ce grand homme nous donne le spectacle, et par lequel il va contribuer, bien plus encore que saint Jérôme, à décider la question agitée dans toute l’antiquité chrétienne. Je ne vous parlerai pas de cette première passion de saint Augustin pour les lettres anciennes, des larmes que Didon lui coûtait, de l’ardeur avec laquelle il lisait l’Hortensius de Cicéron et, plus tard, les livres des platoniciens ; je veux m’arrêter au temps de sa conversion, dépasser l’époque où il abjura toutes ses erreurs ; je le suis dans sa retraite de Cassiciacum, où il voit s’écouler paisiblement quelques mois avec ses amis et élèves, Trygetius et Licentius ; ils consacrent leurs matinées à discuter les grandes questions théologiques, ils commentent l’Hortensius de Cicéron, et lisent chaque jour la moitié d’un chant de Virgile. Saint Augustin n’est donc pas pressé d’abjurer tout ce qu’il admira autrefois ; il n’ignore pas cependant les déclamations de Tertullien, d’Arnobe, de Lactance, de tous ces hommes que l’Église n’a pas rangés au nombre des saints. C’est ainsi que, dans les Confessions, le livre le plus pieux sorti d’une âme pieuse, il rappelle l’époque où des livres platoniciens lui étaient tombés entre les

  1. Voir les notes à la fin de la leçon, ler.