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Page:Ozanam - Œuvres complètes, 2e éd, tome 01.djvu/358

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des siècles. Sur la parole d’Augustin et par les mêmes motifs, tous les âges qui suivront accepteront l’héritage des anciens ; mais l’Église l’accepte comme il convient à une tutelle sage, comme on accepte les successions des mineurs, c’est-à-dire sous bénéfice d’inventaire. C’est par la même raison que se déterminent Cassiodore, Bède, Alcuin ; tous, par un phénomène intellectuel qu’il est bon de signaler, tous plus frappés des comparaisons que des raisons, des images que des grands motifs, répéteront cette parabole que le christianisme a dû faire comme le peuple hébreu au sortir de l’Égypte, et emporter les vases d’or et d’argent de ses ennemis. Ce sera sur cette parole que les sciences, les arts, les traditions de l’antiquité passeront au moyen âge[1]  ; c’est ainsi que ce grand problème a été résolu et que s’est fait le nœud littéraire, intellectuel, qui devait réunir les deux âges.

Il me resterait à vous montrer comment Virgile, divinisé par la science païenne, érigé en pontife, en flamine, en héritier de la tradition sacerdotale, devint aussi le représentant de la religion de l’avenir, et comment, pour le sauver, les siècles barbares ont jeté sur lui un bout de manteau de prophète. Grâce à sa quatrième églogue, il fut regardé, dans le monde chrétien, comme l’un de ceux qui avaient annoncé le christianisme, et cette interprétation, qui commence à Eusèbe, dès le quatrième siècle, se continue pendant tout le

  1. Voir les notes à la fin de la leçon, II.