Page:Ozanam - Œuvres complètes, 2e éd, tome 01.djvu/410

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plorer les horreurs ; mais il ne faut pas que la fumée de ces incendies nous dérobe la vérité ; si la victoire de l’épée eut ses fautes, la victoire de la pensée et de la raison ne laissa pas de sujets de regrets ni de larmes. C’est de ce grand conflit du treizième siècle, c’est de cette lutte furieuse que vont sortir tous les grands théologiens dont ce siècle est rempli : saint Thomas d’Aquin, saint Bonaventure et ce grand poëte de l’Italie, Dante. C’est cette théologie qui, ayant profondément agité les esprits, fécondé la pensée, pénétrant dans la longue incubation du quatorzième siècle, au milieu du chaos de ces époques orageuses, jusqu’aux derniers rangs de la civilisation chrétienne, en fera sortir les merveilles du quinzième siècle et manifestera cette magnifique expansion du génie chrétien qui, en moins de cent ans, trouva l’imprimerie, sonda les secrets des cieux avec Copernic, et découvrit une moitié du monde avec Christophe Colomb, tout cela longtemps avant qu’eût paru le moine allemand Luther, auquel on a attribué cependant l’honneur d’avoir réveillé l’esprit humain. La théologie est donc l’âme du moyen âge, et quand je vois s’agiter toutes ces grandes pensées qui vont produire les croisades, la chevalerie, et ce prodigieux mouvement où furent entraînés nos pères, alors je me dis qu’au milieu de ce trouble il y a une âme qui fait sentir son impulsion… Mens agitat molem.

La théologie descend de la foi à la raison et la philosophie remonte de la raison à la foi. Ce retour de l’esprit vers des vérités qu’il a aperçues de loin, qui