Page:Ozanam - Œuvres complètes, 2e éd, tome 01.djvu/413

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Platon a poussé la science de Dieu plus loin qu’aucun des anciens ; il a conçu Dieu surtout comme l’idée du bien, par qui les êtres sont nécessairement intelligibles et par qui ils existent ; c’est un Dieu bon, qui par bonté a produit le monde, mais il ne l’a pas tiré du néant, il l’a produit avec la matière antérieurement existante qu’il a fait sortir du chaos dans lequel elle s’agitait, et il a combattu contre cette matière rebelle qui modifie, gâte et corrompt ses œuvres. Ce Dieu de Platon est bien grand, mais il n’est pas libre, il n’est pas seul, il vit éternellement côte à côte avec la matière indisciplinée, il est vaincu dans ses efforts par la résistance qu’elle lui oppose, il n’est maître qu’à demi ; ce Dieu grand, bon, mais qui n’est pas libre, qui n’est pas seul, ce n’est pas Dieu.

D’autre part, Aristote, dans les quatorze livres de sa Métaphysique, fait les derniers efforts pour surpasser Platon ; il réunit l’appareil scientifique le plus vaste qu’une main humaine ait jamais remué. Cet homme, qui savait l’histoire des animaux, qui avait posé les bases d’une république, qui avait étudié les lois de l’esprit humain et classé les catégories de la pensée, sent enfin le besoin de résumer tout son travail ; il étend les mains à droite et à gauche ; il rassemble toutes les connaissances qu’il a puisées dans l’étude de l’univers entier, et de ces notions les plus ardues de la substance et de l’accident, de la puissance et de l’acte, du mouvement et de la privation, il compose comme autant de degrés au sommet desquels, respirant à peine.