Page:Ozanam - Œuvres complètes, 2e éd, tome 01.djvu/428

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

telle et sans règle ; il fallait, à côté du maître de la philosophie mystique, le maître de la philosophie dogmatique. Il fallait, à côté du mysticisme de saint Augustin, le dogmatisme de saint Augustin.

Dans la première partie de l’histoire intellectuelle de saint Augustin, Dieu le poursuit ; il le poursuit impitoyablement, et par les doutes de son esprit et par les luttes de son cœur, jusque dans les abaissements et dans les turpitudes de sa chair ; saint Augustin a beau échapper à sa patrie, à sa mère, il n’échappe pas à Dieu qui le rejoint à Milan, dans le coin de ce jardin, sous ce figuier où nous l’avons suivi. Après que Dieu l’a atteint une première fois, c’est saint Augustin qui va poursuivre Dieu, il le trouvera ; mais il a beau le posséder, il ne le possède jamais assez ; il en veut jouir davantage. Tout le travail de sa philosophie consistera donc à retourner, par un effort de la raison, à ce Dieu qu’il avait atteint par l’amour.

Au moment où fut prise cette grande résolution de se donner sans retour à Dieu, Augustin avait résolu aussi de quitter l’école dans laquelle il ne trouvait qu’un trafic de vanité. Il avait obtenu qu’un de ses amis, Verecundus, lui donnât un asile dans sa belle villa de Cassiciacum, à quelque distance de Milan, où il cherchait ce calme dont on a besoin après les grands orages du cœur. Il était malade, sa poitrine était menacée, mais l’invincible activité de son esprit ne pouvait se condamner au repos ; sa mère, son frère, son fils et quelques parents étaient avec lui ; entouré des amis qui l’avaient suivi, il