Page:Ozanam - Œuvres complètes, 2e éd, tome 01.djvu/427

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ment qui n’est pas dans sa destinée ; elle fait appel à la nature, à la nature tout entière, avec ses splendeurs, ses erreurs et ses illusions. C’est la beauté qui aide Augustin à revenir à Dieu ; toutes les choses terrestres l’ont séduit, l’ont trompé ; mais sous ces séductions, ces erreurs, il y avait une vérité, une réalité qui se faisait sentir et qui seule était capable d’attirer son cœur. Il a fini par écarter tous les voiles pour arriver jusqu’à cette beauté profonde, essentielle, que les créatures cachaient sous leurs formes, jusqu’à cette beauté qui n’est autre chose que le rayon du Créateur. C’est là encore un des caractères du mysticisme, qui est symbolique, qui cherche dans la nature le reflet de la Divinité et les vestiges de l’invisible. Avec ces trois caractères, le mysticisme sera le même dans tous les temps, et pendant le moyen âge le mysticisme de saint Augustin deviendra celui de Hugues et Richard de Saint-Victor, de saint Bonaventure et de tous les grands maîtres de la philosophie mystique en Occident.

Mais il faut reconnaître que cette doctrine a ses périls ; elle l’avait prouvé par l’exemple de saint Augustin et elle le prouvera longtemps après lui. Le mysticisme est sans contrôle ; car l’amour a des élans et des bonds dont il ne veut rendre compte à personne : il peut s’égarer, se laisser entraîner dans des voies où les liens de ses ailes se rompront, et, voulant s’approcher du soleil, il se précipitera dans l’abîme. Il est donc nécessaire qu’il soit surveillé. Il ne fallait pas dans le christianisme une philosophie mystique seule, sans tu-