Page:Ozanam - Œuvres complètes, 3e éd, tome 10.djvu/100

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Les vacances de 1833 furent pour Ozanam les plus belles que puisse rêver un jeune homme de vingt ans : toute la famille partit pour l’Italie. Pendant que madame Ozanam restait auprès d’une sœur mariée à Florence, le père et ses deux fils aînés visitaient Rome, Naples, Lorette, Milan, etc. La correspondance d’Ozanam n’a gardé que peu de traces de ce voyage, et dans les notes assez courtes qu’il prend, rien ne montre un sentiment bien vif des beautés de la nature qu’il devait sentir plus tard d’une manière si exquise. Les chefs-d’œuvre de l’art le frappent davantage, la poésie l’enchante ; mais la pensée philosophique qui le domine le suit partout. « Lorsque, réalisant un pèlerinage souvent rêvé, écrit-il « plus tard, on est allé visiter Rome, et qu’on a monté avec « le frémissement d’une curiosité pieuse le grand escalier du « Vatican, après avoir parcouru les merveilles de tous les âges « et de tous les pays du monde, réunies dans l’hospitalité de « cette magnifique demeure, on arrive à un lieu qui peut être appelé le sanctuaire de l’art chrétien : ce sont les Chambres de Raphaël. » Là, devant la Dispute du Saint-Sacrement, devant cet immortel chef-d’œuvre, il est saisi d’une admiration enthousiaste ; mais que voit-il tout d’abord, qu’est-ce qui le frappe ? C’est Dante couronné de lauriers. Pourquoi l’image d’un tel homme, se demande-t-il, a-t-elle été placée parmi celles des plus vénérables défenseurs de la foi ? Cette pensée, qui jaillit dans son intelligence, le tourmente, le poursuit, et deviendra le sujet de sa thèse et de son premier livre, qu’il mûrira, qu’il travaillera pendant six ans, jusqu’à ce qu’il en ait fait : Dante, ou la philosophie catholique au treizième siècle.