Page:Ozanam - Œuvres complètes, 3e éd, tome 10.djvu/214

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du bien semblent par leurs suggestions vouloir redoubler mes agitations et mes ennuis. Il est certain que je quitte Paris pour toujours dans cinq ou six mois. Mais que ferai-je à Lyon ? Voilà le point sur lequel portent toutes mes incertitudes. On voudra me faire beaucoup plaider, et pourtant il me paraît qu’il me serait bien dur de rester confiné dans l’étroite sphère du forum.Est-ce orgueil ? Est-ce vocation ? Est-ce inspiration d’en haut ou tentation d’en bas ? Tout ce que j’ai fait depuis cinq ans, est-ce raison, est-ce folie ? mon cher ami, priez pour que le bon Dieu réponde à toutes ces questions que je m’adresse chaque jour. Il me semble que je suis résigné à faire sa volonté, quelque humble rôle, quelque douloureuse mission qu’il me prépare. Mais que cette volonté me soit connue ! que je ne sois plus, comme je le suis depuis cinq ans, divisé contre moi-même, c’est-à-dire faible, impuissant, inutile. Hélas ! il m’a été fait des grâces si nombreuses, qu’elles me sont un sujet d’effroi chaque année de ma vie a reçu du ciel plus de bienfaits que d’épreuves, et cependant je vous l’assure, si ce n’était le sentiment de mon indignité morale, je désirerais beaucoup que cette vie finît bientôt, et que le jour succédât à ce crépuscule nébuleux dans lequel je marche enveloppé sans savoir sur quelle pierre mon pied se pose ni vers quel but ma course se dirige. Pardon si je vous ai entretenu de mes tristesses.