Page:Ozanam - Œuvres complètes, 3e éd, tome 10.djvu/43

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turcs, je suis le seul qui fasse maigre et par là même exposé à mille quolibets. Il est fort désagréable de se trouver en pareille société. Vous ne direz ce que vous en pensez et ce qu’en pense mon père, et si vous jugez que je prenne d’autres arrangements. Je commence à connaître un peu Paris, malgré la pluie qui est continuelle. J’ai vu le Panthéon, singulier monument, temple païen au milieu d’une ville dont tous les habitants sont chrétiens ou alliées, coupole magnifique, veuve de la croix qui la couronnait si bien, superbe façade dont la couleur sombre indique une origine bien antérieure à son extravagante destination. Que signifie, en effet, un tombeau sans croix, une sépulture sans pensée religieuse qui y préside ? Si la mort n’est qu’un phénomène matériel qui ne laisse après lui aucune espérance, que veulent di.re ces honneurs rendus à des os desséchés et à, une chair qui tombe en pourriture ? Le culte du Panthéon est une véritable comédie comme celui de la Raison et de la Liberté. Mais le peuple a besoin d’une religion, et, quand on lui a ôté celle de l’Evangile, force est bien de lui en fabriquer une autre, fût-ce au prix de la folie et de la bêtise.

J’ai été amplement dédommagé de ces tristes réflexions par la beauté de l’église Saint-Etienne du Mont, ma paroisse, la pompe des cérémonies et la magnificence du chant et des orgues. Un frémis-