Page:Ozanam - Œuvres complètes, 3e éd, tome 11.djvu/194

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l’abbaye, les habitations sont resserrées, presque toutes sont en pierre. Plus loin elles s’éparpillent, elles s’isolent elles ne sont plus qu’en bois. On voit bien comment un monastère engendrait une ville. Si la ville devenait plus grande, un jour ou l’autre, elle tuerait peut-être le monastère; mais Einsiedeln est a deux mille neuf cent quatre-vingt-dix pieds au-dessus du niveau de la mer, à mille pieds de plus que Saint-Gall, et il faut encore quelque temps avant que les manufactures et les usines aillent s’implanter à cette hauteur. L’industrie est une plante grimpante, mais le monachisme est monté plus haut qu’elle. Les chalets de la Suisse sont bien riants mais ces constructions de bois accusent un peuple encore nomade. Les peuples vraiment civilisés et sédentaires bâtissent en pierre la pierre ne se déplace pas. On reconnaît les mœurs décrites par Tacite «  Colunt discreti, ut fons, ut nemo placuit ~. » A Schwitz, par exemple, à peine quelques maisons se tiennent et se touchent; les autres se détachent, et toute la ville est éparse dans la vallée et sur les pentes voisines. Nous avons vu la Via Mala, les bains de Pfeffers; nous avons suivi des torrents dans les vallées étroites, assourdis par le bruit des cascades, écrasés par la hauteur menaçante des rochers. J’ai admiré toutes ces. choses; mais j’aime encore mieux un paysage silencieux et découvert, comme à Ragalz