Page:Ozanam - Œuvres complètes, 3e éd, tome 11.djvu/298

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ton nom avec celui d’Alphonse au premier rang de ceux que je recommandais. Enfin ce lieu m’a tout à fait rappelé Einsiedeln et Lorette, et j’ai peu vu de pèlerinages qui aient un caractère aussi touchant. Le lendemain dimanche, après la messe ouïe, nous avons pris le chemin de Carnac, où nous voulions voir ces pierres qui, font le désespoir des savants. Figure-toi, dans une plaine de six lieues, plusieurs légions de pierres rangées en bataille ; les plus hautes n’ont guère que trente pieds, mais ce qui étonne, c’est leur nombre, c’est d’en compter mille, douze cents, sur onze rangs également espacés.

De distance en distance, s’élèvent des dolmens, des tumulus, surmontés d’un menhir, c’est-à-dire d’une pierre levée. Cette procession de monuments s’interrompt quelquefois, puis recommence bientôt pour aboutir à Locmariaker, dont nous avions déjà visité les sanctuaires druidiques. Tout ceci était donc un territoire sacré, peut-être une sorte de cimetière, où, à la suite de quelque grande bataille, les Celtes voulurent élever une pierre à chacun de leurs morts. Dans le voisinage on reconnaît des tertres de cendres et de charbon, marquant peut-être les bûchers qui dévorèrent les guerriers. Cet Élysée barbare était mis sous la protection des dieux, de Belenus, le vainqueur du Dragon, et de Hu-Gadarn, le dompteur de taureaux. Aujourd’hui Belenus est remplacé par saint Mi-