Page:Ozanam - Œuvres complètes, 3e éd, tome 2.djvu/132

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d’abord dans la poésie épique, ensuite dans le théâtre des Latins enfin Catulle et Horace empruntèrent aux poëtes lyriques de l’école éolienne les plus ingénieuses et les plus délicates combinaisons qu’avait pu permettre l’harmonie de leur belle langue.

Ainsi vint un moment où la Grèce n’eut pas de trésor sur lequel Rome n’étendit la main ; vint une heure, bien courte, il est vrai, où se déclara cette maturité parfaite de la langue latine, où on la vit capable à la fois de poursuivre, avec Cicéron, tout l’essor de l’intelligence humaine jusqu’aux derniers degrés qui touchent à l’infini capable de pénétrer avec les jurisconsultes les dernières" profondeurs, les plus. subtiles délicatesses, les replis les plus cachés des affaires humaines et aussi, avec Virgile, d’arracher à des syllabes autrefois rauques et sans harmonie des sons qui devaient charmer pendant longtemps les oreilles de la postérité, qui les charment encore, et des cris poétiques capables de faire évanouir Octavie entre les bras d’Auguste. C’est là la grandeur, la beauté de cette langue latine qu’on ne saurait assez louer dans l’incomparable et trop court moment que je viens de marquer. Mais cette culture artificielle ne pouvait durer longtemps. Les langues portent en elles-mêmes une loi de décomposition qui veut qu’arrivées à une certaine maturité, elles fassent comme les fruits, tombent, s’ouvrent et rendent à la terre des semences