le mauvais goût. C’est que les Pères latins ne parlent pas à une population aussi polie, ils s’adréssent à une multitude bien autrement mêlée. A Antioche, à Césarée, à Constantinople, les Pères grecs ont encore devant eux les restes choisis de la société ancienne mais à Hippone, le peuple qui se presse autour de la chaire de son évêque n’est composé que de pécheurs et de paysans ; à Milan même et à Rome, au milieu de toute cette multitude, je reconnais un nombre incalculable d’affranchis et de mercenaires dont le son de voix guttural rappelle les forêts d’où ils sont sortis. Pour faire la conquête de ces populations si mêlées, si peu sensibles aux charmes extérieurs de.la parole, il faut d’autres moyens il faut être avec elles familier, sensé, pathétique. Ces trois conditions sont, en général, le caractère dominant de l’éloquence des Pères latins.
Cependant chez saint Ambroise on trouve mieux ; on trouve plus fidèlement conservés les restes et comme un dernier parfum de l’art ancien. Dé même que, dans sa doctrine, il faisait une part plus large aux grâces de la forme et même du costume, de même aussi, dans son langage, il a je ne sais quel miel attique. On racontait que, saint Ambroise encore au berceau, dormant un jour dans la cour du prétoire à Trêves, un essaim d’abeilles vint se poser sur ses lèvres, comme autrefois sur les lèvres de Platon. Ce récit