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moins fermes et réduire au silence des chaires moins puissantes. Je ne méconnais donc pas les dangers qui menacèrent alors l’esprit humain ; j’en donne une preuve de plus : Pendant que les diplômes de la période lombarde font voir à quel degré de corruption était descendu le langage des affaires et de la vie civile ; les hymnes que je publie montrent le même désordre pénétrant dans la langue de l’Église, et toutes les règles de la prosodie et de la grammaire violées dans les chants mêmes de ces monastères qui devaient sauver les lettres[1].

Les lettres
à Rome
du VIe
au VIIe siècle

Cependant, ni la chute de la monarchie des Goths, ni la désolation de Rome livrée tour a tour aux violences de Totila, de Bélisaire et de Narsès, rien n’avait pu étouffer le goût des jouissances d’esprit chez le peuple romain, aussi attaché à ses plaisirs qu’à ses monuments. A la fin du sixième siècle, on lisait solennellement Virgile au forum de Trajan : les poëtes contemporains y déclamaient leurs ouvrages, et le sénat décernait un tapis de drap d’or au vainqueur de ces combats littéraires[2] Quand la passion des vers était si vive-

  1. Voyez ci après l’Hymnarium vaticanum et surtout l’hymne de saint Flavien.
  2. Fortunati Carmina, lib. VI, 8.

    Aut Maro Trajano lectus in urbe foro.

    Idem III, 20

    Vix modo tam nitido pomposa cultu
    Audit Trajano Roma verenda foro.
    Quod si tale decus récitasses aure senatus,
    Stravissent plantis aurea fila tuis.