Page:Ozanam - Œuvres complètes, 3e éd, tome 2.djvu/7

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ne définit, d’une passion idéale sans doute, mais qu’il n’aurait jamais conçue, si cette beauté idéale de Laure ne lui était pas apparue sous une forme sensible. Saint Augustin ne voit là qu’une faiblesse et prie Dieu de lui permettre d’accompagner le poëte pour le sauver. Pétrarque, vaincu par l’argumentation du saint docteur ; se rend enfin, et s’écrie : « Oh ! puisse s’exaucer ta prière ! Puissé-je, sous les auspices divins, sortir sain et sauf de ces longs détours, sentir enfin les flots de mon esprit tomber, le monde se taire autour de moi, et finir les tentations de la fortune ! »

Le christianisme n’était pas venu seulement fonder cette doctrine, qui s’éclaira dans les écrits de saint Augustin d’une si vive lumière : il était venu, par-dessus tout, fonder une société ; une société qui devait s’ouvrir et recevoir dans ses rangs les innombrables bandes des barbares déjà en chemin plusieurs siècles avant le christianisme pour se trouver au rendez-vous qui leur était marqué. Il faut savoir quelle puissance les attendait pour les subjuguer, les instruire, les policer : il faut savoir si les grandes institutions catholiques s’introduisirent, ainsi qu’on l’a beaucoup répété, à la faveur de la barbarie, et comme furtivement, dans la grande nuit de l’esprit humain.

Parmi les institutions qui devaient agir avec le plus de puissance sur le moyen âge, il en est deux auxquelles je m’arrête, que je détache des autres à