Page:Ozanam - Œuvres complètes, 3e éd, tome 2.djvu/93

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En 416, le concile de Milève interdit aux époux divorcés de convoler à d’autres noces, c’est-à-dire qu’il convertit pour toujours le divorce en simple séparation de corps. De là toute la théorie chrétienne du mariage, telle qu’elle est restée et telle qu’elle a résisté à toutes les atteintes des siècles. Dans le mariage, il y a autre chose qu’un contrat ; par-dessus tout il y a un sacrifice, ou mieux deux sacrifices : la femme sacrifie ce que Dieu’lui a donné d’irréparable, ce qui fait la sollicitude de sa mère, sa première beauté, souvent sa santé, et ce pouvoir d’aimer que les femmes n’ont qu’une fois ; l’homme, à son tour, sacrifie la liberté de sa jeunesse, ces années incomparables qui ne reviendront plus, ce pouvoir de se dévouer pour celle ’qu’il aime, qu’on ne trouve qu’au commencement de sa vie, et cet effort d’un premier amour pour lui faire un sort glorieux et doux. Voilà ce que l’homme ne peut faire qu’une fois, entre vingt et trente ans, un peu plus tôt, un peu plus tard, peut-être jamais !… Voilà pourquoi je dis que le mariage chrétien est un double sacrifice ; ce sont deux coupes dans l’une se trouvent la vertu, la pudeur, l’innocence ; dans l’autre un amour intact, le dévouement, la consécration immortelle de l’homme à celle qui est plus faible que lui, qu’hier il ne connaissait pas, et avec laquelle, aujourd’hui, il se trouve heureux de passer ses jours ; et il faut que les coupes soient également pleines pour que