Page:Ozanam - Œuvres complètes, 3e éd, tome 5.djvu/200

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

nouvelle condition, l’homme, sans quitter la terre, pourrait atteindre la perfection des bienheureux, par conséquent à leur liberté, à leur impeccabilité. Dès lors la loi ne. le lierait plus il s’interdirait l’exercice des vertus comme un trouble de son repos la raison, maîtresse des sens, ne craindrait plus de leur accorder les contentements qu’ils réclament. » Ces rêves de la cellule se prêchaient sur la place publique, soulevaient des milliers de sectaires sous le nom de Fraticelles. et de Beggards, mettaient l’Italie en feu et la chrétienté en péril[1]. Mais l’humilité de Jacopone le sauva de ces égarements. Jusque dans les derniers ravissements de l’extase, il emporte le sentiment de sa fragilité : il ne connaît pas de hauteur d’où l’amené puisse déchoir, ni de contemplation qui dispense du mérite des œuvres. Ce serviteur de l’amour véritable poursuit de toute sa jalousie ceux qu’il appelle les adeptes de l’amour contrefait et les invectives mêmes dont il les flétrit nous font entrer dans le vif des controverses contemporaines. « L’amour qui n’est pas sage ne peut voir les excès il renverse les lois, les statuts, et toute coutume bien ordonnée ; il se dit arrivé à cette élévation où nul commandement n’oblige. Mais toi, Charité qui es la vie, tu ne vas point renversant les lois

  1. Raynaldus, Annales eccles.. contin. ad ann.1294, 1297, 1511, 1512. Muratori, Scriptores Rer. Italic., IV, Historia Dulcini haeresiarchae . Wadding, Annales, ad ann. 1297.