poëte tout brûlant d’amour de Dieu et de passions politiques, humble et téméraire, savant et capricieux capable de tous les ravissements quand il contemple, de tous les emportements quand il châtie et lorsqu’il écrit pour le peuple, descendant à des trivialités incroyables, au milieu desquelles il trouve tout à coup le sublime et la grâce. Nous n’avons pas méconnu ses défauts : il a le génie ; il n’a pas le goût, le goût, cette pudeur de l’imagination qui ne supporte pas les excès. Il aime, au contraire, les images repoussantes et lorsque, par exemple, en expiation de ses péchés, il veut demander à Dieu tous les maux de cette vie, il se plaît à dresser un dénombrement de maladies dont les noms seuls font horreur. Mais tournez quelques feuillets, et vous verrez dans un de ses chants mystiques les Vertus descendre au-devant de lui toutes radieuses de beauté, sur une échelle de fleurs et de lumière. Ces contrastes me rappellent le grand peintre Orcagna et son Triomphe de la mort. On y voit trois cadavres à trois degrés divers de décomposition, des estropiés, des lépreux qui voudraient mourir, des démons grimaçants. Quoi de plus trivial ? Mais en même temps quoi de plus pathétique et de plus gracieux que le groupe des jeunes gens et des jeunes femmes devisant d’amour au son du luth, dans l’oubli de la mort qui va les moissonner, tandis que les solitaires l’attendent paisiblement sur leur montagne, occupés, l’un à lire la Bible, l’autre à
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