Page:Ozanam - Œuvres complètes, 3e éd, tome 5.djvu/271

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des racines, et des eaux, écris que là n’est pas la joie parfaite. » Et marchant encore un peu, il s’écria à haute voix : « Ô frère Léon, lors même que le frère Mineur saurait si bien prêcher qu’il convertirait tous les infidèles à la foi du Christ, écris que là n’est point la joie parfaite. » Or, comme ces discours avaient bien duré l’espace de deux milles, frère Léon, avec un grand étonnement, interrogea le saint, et lui dit : « Père, je te prie, de la part de Dieu, de m’apprendre où est la joie parfaite. Et saint François lui —répondit « Quand nous serons à Sainte-Marie-des-Anges, ainsi trempés de pluie, transis de froid, souillés de boue, mourant de faim, et que nous frapperons à la porte du couvent, et que le portier viendra en colère nous demander : « Qui êtes-vous ? » et quand nous lui dirons : « Nous sommes deux de vos frères, » et qu’il répondra : « Vous ne dites pas vrai, vous êtes deux ribauds qui allez trompant le monde et dérobant les aumônes des pauvres, allez-vous-en ; » et lorsqu’il ne nous ouvrira point, et nous fera rester dehors, à la neige et à la pluie, avec le froid et la faim, jusqu’à la nuit ; alors si nous supportons tant d’injustice, de dureté et de rebuts, patiemment, sans trouble et sans murmure, pensant avec humilité et charité que ce portier nous connaît véritablement, et que Dieu le fait ainsi parl1er contre nous, ô frère Léon, écris que là est la