Page:Ozanam - Œuvres complètes, 3e éd, tome 7.djvu/210

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saient l’appauvrissement de l’empire et l’envie des barbares.

Il n’y a pas, en effet, de doctrine puissante en religion non plus qu’en philosophie, qui se soit résignée à s’enfermer dans les consciences, qui n’ait aspiré à faire l’éducation des peuples, et en ce sens l’Évangile est aussi une doctrine sociale. Dès le temps des persécutions nous l’avons vu introduire dans le monde ces principes de liberté et de fraternité qui en devaient renouveler la face. Mais il faut savoir jusqu’où il les poussa, dans quelle mesure il les contint, et enfin ce qu’il fit pour l’organisation économique de la société, au moment où il sembla en disposer en maître, c’est-à-dire au moyen âge.

Jamais peut-être les principes introduits par le Christianisme ne coururent plus de péril qu’au moment même où ils venaient de vaincre la résistance de l’empire romain et de faire leur avènement dans les lois comme dans les mœurs. Les barbares qui envahirent l’empire ne connaissaient ni la liberté ni la fraternité. Le paganisme dont ils étaient pénétrés ne leur avait appris que l’inégalité des hommes devant les dieux. Le désordre profond qui les travaillait ne laissait place qu’à une farouche indépendance, à un égoïsme ennemi de toute loi, à la soif de l’or et du sang. Les traditions des Germains sont pleines de ces combats fratricides que les héros se livrent pour un trésor disputé ; et, quand ils entrent dans les provinces