Page:Ozanam - Œuvres complètes, 3e éd, tome 7.djvu/30

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non de Castille Le roi et les fils de nobles qui juraient avec lui répondirent : Amen. » Et le Cid voulut que le roi répétât par trois fois le même serment. La seconde fois le roi changea de couleur ; la troisième, il fut très-irrité contre le Cid et désormais il ne l’aima plus[1]. La tradition, qui souvent se dégrade en descendant le cours des siècles, a gâté ce beau récit. Elle prête aux contemporains du Cid une superstition triviale, et les fait jurer, non plus sur l’Evangile, mais sur un verrou (el verrojo), qu’on montre encore à la porte de l’église.

Or Alfonse VI n’avait pas oublié son ressentiment et, comme un jour le Cid était venu le trouver entre Burgos et Vivar, le roi lui dit « Ruy Diaz, sortez de ma terre » ! Le Cid donna des éperons à sa monture et sauta dans une terre de son patrimoine « Seigneur, lui dit-il, je ne suis pas sur votre terre, mais sur la mienne. » Le roi reprit fortement courroucé « Sortez de tous mes royaumes et sans délai. » Ici commence l’exil du Cid. C’est à Burgos qu’il en faut lire l’histoire, près de cette porte moresque par laquelle le banni passa, sur les ruines de ces murs vers lesquels il retourna les yeux. Il la faut lire dans le Poëme du Cid, plus ancien que les Romances, plus ancien que la Chronique, et dont le texte mutilé débute par la disgrâce du

  1. Cronica del Cid, cap. LXXVIII et LXXIX.