Page:Ozanam - Œuvres complètes, 3e éd, tome 7.djvu/6

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chaperon et leur manteau, celles qu’ils rapportaient à leurs enfants, et que les amis et les voisins se passaient de mains en mains pendant les longues veillées d’hiver. Moi aussi j’ai rêvé le pèlerinage de Saint-Jacques. Je me réjouissais devoir la vieille Espagne chrétienne, cette Espagne libre, pauvre, délaissée, qui subit moins profondément l’empreinte de l’étranger. Là m’attendait Burgos, la ville de Notre-Dame, la ville des rois et des héros; Oviedo et ses vallées, vierges de la conquête musulmane enfin Sant-Iago, dont la basilique, dépouillée par les révolutions, conserve du moins la majesté de sa gigantesque architecture. Mais une volonté qui dispose de nous sans nous devait m’arrêter à la première station, et mon pèlerinage finir, non plus au tombeau de saint Jacques, mais au pays du Cid. Je suis donc revenu les mains vides de coquilles, mais pleines de ces feuilles légères où le voyageur a crayonné ses premiers souvenirs, se promettant vainement de les retoucher plus tard. Je ne puis rien offrir de plus à mes amis, à ceux de mon voisinage j’entends ce voisinage de l’esprit et du cœur qui unit aujourd’hui beaucoup de chrétiens, et qui leur fait prolonger ensemble la veillée avec confiance, malgré de bien mauvaises nuits.