Page:Pérochon-Le Chemin de plaine.djvu/39

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O mon Amour défunt, je viens à vous dans l’ombre.
Sur le parvis secret je fléchis les genoux
Et voici mon cœur net comme un grand miroir sombre,
Et voici que la paix souveraine est sur nous.

O mon Amour joyeux, tendez vos mains ouvertes
Et, doucement, chantez ; chantez comme autrefois
Au temps où le vent clair frisait les forêts vertes,
Chantez avec l’espoir immense en votre voix !

O mon Amour joyeux, venez avec des ailes
Sur le jeune chemin, dans le jour indolent ;
Étincelant berger de mes ardeurs fidèles,
Étendez du soleil sur votre troupeau blanc.

Amour, Amour ancien qui croisez vos mains fines,
Amour de mon printemps candide et radieux.
Veuillez illuminer d’allégresse divine
L’étrange obscurité de mon âme et des cieux.

Je fus un peu interloqué. Après une chanson on frappe dans ses mains et on crie : bravo ! Après un sermon on remue les pieds et on se mouche. Après un toast, après un discours, je ne suis pas trop embarrassé pour prendre une attitude convenable. Mais que faut-il faire, à onze heures du matin, au bord d’un ruisseau, quand vous êtes seul avec un ami et que cet ami vous lit des vers de sa fabrication ?

J’avais dans l’oreille son obscurité étrange des cieux et dans l’œil un éclat de soleil ; il m’avait fourré pour la seconde fois son papier entre les mains et mes doigts étaient mouillés. Toutes ces