Page:Pérochon-Le Chemin de plaine.djvu/40

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

sensations hétéroclites augmentaient le désordre de mes idées.

Je réussis cependant à penser à peu près ceci :

— Si je le complimente, il va — je le connais — me démontrer que je n’y entends rien et peut-être me renvoyer baigner. D’ailleurs, a-t-il lu pour moi ou pour lui ? Pour lui surtout : cela l’amuse et cela le soulage. Il faut pourtant dire quelque chose.

J’eus donc l’air d’écouter en moi la résonnance des rimes, puis je déclarai :

— Tu es un type !

Cette phrase est commode : elle est flatteuse et peu compromettante. Elle me sert souvent.

Cependant, il était temps de rentrer à Lurgé. Je pris le panier et j’entraînai Évrard. Il n’avait pas l’air pressé. À mesure que nous approchions du bourg son front devenait soucieux.

— Maximin, fit-il tout à coup, tu déjeunes à la maison. Oh ! pas de gestes ! pas de mais ! tu n’as aucune raison pour refuser.

— Toi, pensai-je, tu t’es évadé ce matin et tu veux maintenant que je te serve de parafoudre… Je te dois bien ça, achevai-je tout haut, je veux seulement m’armer de pralines.

Il m’attendit à la porte de l’épicerie ; puis nous pénétrâmes chez lui. J’allais le premier, portant par prudence mes mains devant moi, mes mains pleines.

— Bonne santé à toute la famille !