Aller au contenu

Page:Pérochon-Le Chemin de plaine.djvu/41

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Toute la famille est en effet là.

Les traits de belle-maman sont fixes et durs comme du cœur de chêne. Son visage ne s’affirme vivant que par le frémissement continuel de deux petites noix qu’elle a vers le haut des mâchoires, à côté de l’oreille.

Comme elle doit mordre !

Quant à Madame, elle a dû être jolie ; elle a encore de fameux restes. Ses yeux sont froids comme des pierres, mais de très belles pierres bleues. Malheureusement, elle a de la dent comme sa mère.

— Monsieur Édouard, j’ai bien l’honneur…

M. Édouard a cinq ans ; il est solide et d’une belle carnation. Il serait aimable à regarder n’était sa mâchoire à lui aussi.

Il daigne faire accueil à mes pralines. Ces dames, de leur côté, apprécient fort les poissons.

Évrard fait le gentil.

— Voyez, mesdames ! c’est la jolie friture ! c’est le fin poisson d’eau vive !

— Vous êtes un adroit pêcheur, monsieur Tournemine.

— Madame, je n’ai rien pris du tout. C’est votre gendre qu’il faut complimenter.

Aïe !

À table, la conversation prit vite une fâcheuse tournure. J’avais prié que l’on ne se donnât point de soins extraordinaires pour moi. Hors les poissons, il n’y avait rien.