bouillie. On acheta donc un biberon, et la Pitaude fournit le lait. Mais quatre sous de lait par jour font six francs à la fin du mois, le quart du gage : c’était une grosse dépense. Quand les petits eurent six mois, Delphine n’acheta plus qu’un demi-litre de lait par jour, et dans ce lait, elle fit tout de même bouillir des croûtes de pain.
Louise commençait à marcher seule ; elle donnait beaucoup de peine aussi. Elle était pâle, nerveuse, sujette aux convulsions ; pendant des journées entières elle restait accrochée aux cotillons de sa mère.
Il avait fallu un second lit pour coucher la petite et la grand’mère Bernou quand elle venait aux Pelleteries. Il était bien vieux, bien vermoulu, ce lit, il était mince de plume, mais tout compte fait, il revint quand même à plus de cent francs.
Au temps des nuits courtes, où les hommes harassés ont absolument besoin de dormir d’un trait, il arriva à Séverin d’y coucher seul ; Delphine prenait avec elle Louise et un des bessons, l’autre couchant dans le berceau. De cette manière, quand les enfants criaient elle les faisait téter, les dorlotait, les apaisait tout bas ; elle ne dormait pas, mais le somme du moissonneur n’était pas interrompu, ce qui était l’essentiel.
À la Toussaint, quand le bois fut acheté pour l’hiver et le pain payé, il resta cent cinquante francs pour passer l’année. Les Pâtureau furent tout de même contents, parce que les bessons avaient bien poussé ; mais Delphine, cette fois, ne parla pas de se mettre en borderie, ni même de changer de maison, et le carême d’après fut long.