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Page:Pérochon - Les Creux de maisons.djvu/215

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M. Magnon eut un geste d’agacement.

— Quand je vous le dis, moi ! Il est de race, l’animal. Souvenez-vous du père… Le fils est tout pareil. Ça crève de faim, mais ça veut faire comme les riches. La maraude, la chasse, la pêche, tout est bon ; ça vous a des pattes crochues ; ça tire tout à soi… Pas plus tard que dimanche dernier — vous voyez que je suis renseigné — il a vendu, votre Pâtureau, il a vendu un lièvre quatre francs à une personne du bourg ; oui, Chauvin, un lièvre de sept livres, une femelle et pleine encore ! Et voilà comment moi qui ai du bien, moi qui nourris des chiens, moi qui paye un permis, je ne ramasse rien au temps de la chasse !

— Quatre francs ! voilà quatre francs bien tombés ! pensa tout haut Chauvin.

— Ah ! vous êtes dans ces goûts ?

— Non pas, notre maître ! vous savez que je n’ai jamais été pour la braconne. Je dis seulement qu’il y a de la misère chez mon valet. Il y a deux ans, la mère est morte pour avoir travaillé au delà de ses forces ; et maintenant il n’y a que le gage du père pour faire vivre toute la nichée, six enfants et une ancienne. Ça ne fait pas une grosse chique pour chacun, allez !

— Eh oui. Chauvin ! la misère, la malchance, les drôles, les vieux et patati et patata… Voilà des gens qui reçoivent du pain de la commune, qui reçoivent du pain de leurs voisins, des gens à qui l’on paye le médecin, des gens à qui l’on vient en aide de tous les côtés. Eh bien ! ça se plaint tout de même et au besoin ça vole !