mortelles. Savez-vous bien que vous parlez d’une femme dont l’âme, détachée des soins de la terre, brûle d’une flamme céleste ; dont l’aspect, si la vérité n’est pas un vain mot, révèle une beauté divine ; dont les mœurs sont le modèle d’une vertu consommée ; dont ni la voix, ni l’éclat du regard, ni la démarche, ne trahissent rien d’humain ? Songez, songez à cela, je vous prie, et vous saurez quels termes vous devez employer.
S. Augustin. Ah ! insensé ! est-ce ainsi que pendant seize ans[1] tu as attisé ta flamme par des flatteries mensongères ? Certes, l’Italie n’a pas été plus longtemps sous le joug d’un ennemi fameux[2], elle a essuyé moins d’attaques à main armée, elle a éprouvé moins d’incendies, que la violence de ta passion ne t’a causé pendant ce temps d’embrasement et d’assauts. Toutefois, il s’est trouvé quelqu’un pour chasser enfin cet ennemi de l’Italie ; mais ton Annibal, qui l’éloignera de dessus ta tête si tu t’opposes à ce qu’il sorte et si, esclave volontaire, tu l’invites à rester avec toi. Tu te complais dans ton mal, hélas ! Mais, quand le jour suprême aura fermé ces yeux dont tu es éperdument épris, quand tu verras ce visage défiguré par la mort et ces membres livides, tu auras honte d’avoir