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Page:Pétrone - Satyricon, trad. Héguin de Guerle, 1861.djvu/291

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suspendu dans son garde-manger, et qui, outre des fèves pour son usage personnel, contenait un vieux reste de bajoue de porc percé de tous côtés. Elle délie ce sac, et répand sur la table une partie des fèves, qu’elle m’ordonne d’éplucher promptement. J’obéis, et je mets soigneusement à part toutes celles dont la cosse est moisie. Mais Œnothée, impatiente de ma len-teur, s’empare des fèves que j’avais mises au rebut, et, avec ses dents, les dépouille adroitement de leurs enveloppes qu’elle crache sur le plancher, drues comme mouches. La pauvreté est la mère de l’industrie, et l’invention de plusieurs arts doit son origine à la faim. La prêtresse était un admirable modèle de tempérance, et tout chez elle respirait la plus stricte économie : sa demeure, en un mot, était le véritable sanctuaire de l’indigence. Là,

L’ivoire incrusté d’or n’éblouit point la vue ;
Le pied ne foule point le marbre de Paros :
L’hôtesse de ces lieux a pour lit de repos
____Un amas de paille battue,
Que sa main étendit sur un grabat d’osier.
____Quelques paniers, des pots de terre.
____Et quelques vieux tessons de verre
Encor tachés de vin, forment son mobilier.
____Un torchis de chaume et d’argile
Recouvre les parois de ce champêtre asile,