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Page:Pétrone - Satyricon, trad. Héguin de Guerle, 1861.djvu/388

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n’en doutez pas, avoir entendu la voix de la déesse. Et voilà les êtres privilégiés à qui les dieux parlent dans la nuit !

« Tels sont les prestiges qui consacrent ce pontife escorté d’un troupeau de prêtres tondus et revêtus de lin, ce vagabond, ce nouvel Anubis, qui se rit de la superstition des folles qu’il aveugle et séduit. Il prie encore pour celles qui cédèrent aux désirs de leurs époux pendant les jours de continence et de fêtes solennelles. Vous avez encouru, leur dit-il, un châtiment rigoureux ; car j’ai vu le serpent d’argent remuer sa tête. Ses larmes feintes et ses formules préparées apaisent enfin Osiris : bien entendu qu’on l’avait déjà gagné par l’offrande d’une oie grasse et d’un gâteau. Mais est-il vrai qu’il daigne communiquer avec ces insensés ? dans ce cas, l’Olympe est bien oisif, et vous autres dieux, bien désœuvrés là-haut ! »

CHAPITRE CV. 1 Nec non eodem futurus navigio. — Nodot, qui, non content d’avoir attribué à Pétrone des fragments de sa façon, se permet fréquemment d’altérer le texte authentique de notre auteur, dénature ainsi ce passage : Non omen jacturus navigio, hospitio, mihi ; et il traduit : « Je ne l’ai pas fait pour attirer aucun malheur sur le vaisseau, puisque j’étais dedans. » J’avoue franchement que je ne comprends pas cet endroit ainsi défiguré par Nodot, même après avoir lu sa traduction, et il me semble que le texte généralement adopté est beaucoup plus clair ; en voici l’explication : « J’ai ordonné que l’on délivrât mes esclaves de leur longue chevelure, parce que, devant faire route avec eux sur le même vaisseau, je ne voulais pas me trouver à bord avec des malheureux couverts de ces signes de deuil et de châtiment ; j’ai voulu me rendre les auspices favorables en leur faisant raser la tête. » Il est notoire que les anciens regardaient comme un fâcheux présage de se trouver sur le même vaisseau avec des malheureux et des coupables, et même d’habiter auprès d’eux sous le même toit. Ils croyaient qu’en pareil cas le crime d’un seul homme retombait sur ceux qui l’entouraient. C’est ce qu’Horace exprime dans son ode 2 du livre III :

.   .   .   .   .   Vetabo, qui Cereris sacrum
Vulgarit arcanœ, sub iisdem
Sit trabibus, fragilemque mecum
Solvat phaselum. Sœpe Diespiter
Neglectus incerto addidit integrum.


Théophraste se moque de ceux qui, à la moindre agitation des vagues, demandent si tous les passagers sont initiés. D’ailleurs les cheveux longs et en désordre étaient regardés par les anciens comme la marque distinctive des coupables.