Aller au contenu

Page:Pétrone - Satyricon, trad. Héguin de Guerle, 1861.djvu/403

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

avait que les courtisanes qui portassent des perruques blondes ; les matrones n’en mettaient que de noires : c’est pour cela que Juvénal, dans sa satire VI, vers 120, nous représente Messalinecachant ses cheveux bruns sous une perruque blonde : . Nigrum flavo crinem abscondente galero, pour aller dans une maison de prostitution se livrer à la brutalité publique.

CHAPITRE CXI. 1 Matrona quœdam Ephesi tam notœ erat pudicitiœ. — Ce conte de la Matrone d’Éphèse a été traduit ou imité dans toutes les langues ; et c’est le premier morceau du Satyricon qu’on ait fait passer dans la nôtre, comme on l’a vu dans les Recherches sceptiques sur le Satyricon : un clerc, nommé Hébert, la rendit en vers français, vers l’an 1200. Ce sujet a aussi été traité pour la scène, et on lui doit un joli vaudeville. De tous les imitateurs de Pétrone, celui qui a le mieux réussi, c’est La Fontaine, dont on me permettra de reproduire ici le conte, fort joli, sans doute, mais peut-être trop prolixe, trop paraphrasé, et qui est loin, selon moi, de reproduire la piquante simplicité de l’original :


S’il est un conte usé, commun et rebattu,
C’est celui qu’en ces vers j’accommode à ma guise.
____Et pourquoi donc le choisis-tu ?
____Qui t’engage à cette entreprise ?
N’a-t-elle point déjà produit assez d’écrits ?
____Quelle grâce aura ta matrone
____Au prix de celle de Pétrone ?
Comment la rendras-tu nouvelle à nos esprits ?
Sans répondre aux censeurs, car c’est chose infinie,
Voyons si dans mes vers je l’aurai rajeunie.

____Dans Éphèse il fut autrefois
Une dame en sagesse, en vertu sans égale,
____Et, selon la commune voix,
Ayant su raffiner sur l’amour conjugale.
Il n’était bruit que d’elle et de sa chasteté ;
____On l’allait voir par rareté ;
C’était l’honneur du sexe : heureuse sa patrie !
Chaque mère à sa bru l’alléguait pour patron ;
Chaque époux la prônait à sa femme chérie :
D’elle descendent ceux de la Prudoterie,
____Antique et célèbre maison.
____Son mari l’aimait d’amour folle.
____Il mourut. De dire comment,
____Ce serait un détail frivole.
____Il mourut ; et son testament
N’était plein que de legs qui l’auraient consolée,