Page:Pêcheurs de Terre-Neuve, récit d'un ancien pêcheur, 1896.djvu/62

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dans un vase et force les plus malades à s’y tenir les mains. — Il faut se lever quand même. Si on veut en sortir, le moyen n’est pas de s’écouter souffrir. Dame ! les malédictions ne manquent pas. Quelquefois la note gaie reprend le dessus. « Dis donc, un tel, fait un loustic à celui qui geint le plus fort, sais-tu ce qui est excellent pour tes mains, eh bien ! c’est de l’onguent de couverture. — J’ai bien la couverture, reprend l’autre, mais je n’ai pas l’ordonnance. » — Puis un autre : « Quel est donc l’animal, l’infernal monstre qui a inventé ce joli métier ? — C’est une nonne. — Une jeune ? — Non, une vieille ! Et un troisième affirme que ce dut être un curé qui voulait faire aller les hommes au ciel sans confession, etc. » Je suis obligé d’en passer et de plus raides… Après un nombre suffisant de jurons, on arrive à se mettre sur pied et on reprend une besogne qui ressemble de tout point à celle de la veille, et qu’on ne sait que trop par cœur.


Au bout d’une dizaine de jours, ce fut tout à fait fini avec les pêches fructueuses. On retomba dans les journées de deux cents morues, et sans cette abondance des premiers jours, nous n’aurions rapporté qu’une cargaison ridicule en fin de compte. Le produit de la seconde pêche doit pourtant être beaucoup plus riche que celui de la première, si on veut que la campagne soit rémunératrice. Ce ne fut pas précisément notre cas. En trois mois de seconde pêche, nous atteignîmes, si j’ai bonne mémoire, le chiffre de 28,000 morues,