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tiel de savoir si l’on doit les laisser subsister dans leur état actuel. Cette question est du plus grand intérêt national, comme biens héréditaires ; la loi fit le mal, c’est à la loi à y porter remède.

La primogéniture doit être abolie, non seulement parce qu’elle est injuste & contre nature, mais encore parce qu’elle fait souffrir les plus grands maux à la chose publique, en dépouillant, comme je l’ai observé, les enfans puînés de la portion dans l’héritage commun qui leur appartient, l’état est chargé de leur entretien, & la liberté des élections est violée, par l’énorme influence que produit ce monopole injuste du patrimoine des familles. Et ce n’est pas tout. Il prodigue la propriété nationale à toutes sortes d’emplois stériles.

Une portion considérable des terres employées à des parcs étendus, à des forêts de chasse ; & cela dans un temps où les récoltes en grain n’égalent pas les consommations nationales[1]. En un mot, les maux qui résultent du système aristocratique, sont si nombreux & si grands, si contraires à tout ce qui est juste, sage, naturel & bienfaisant que quand on les considère, on ne peut douter que beaucoup de ceux qui se trouvent compris dans cette classe desirent les voir abolis.

Quel plaisir peuvent-ils trouver à voir l’état précaire, même l’indigence certaine de leurs fils puînés ? Toute famille aristocratique, quelle que soit son opulence, est nécessairement entourée de familles moins riches qui, dans très-peu de siècles, ou très-peu de générations, seront plongées dans la misère & se consoleront en contant l’histoire de leurs ancêtres dans les maisons d’aumônes, les maisons de force & les prisons. C’est la conséquence naturelle de l’aristocratie. Le pair & le pauvre qui demandent l’au-

  1. Voyez les rapports sur le commerce des bleds.