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dance. Je me mets à la place de ceux qui souffrent ; & je proteste que si j’étois chassé d’habitations en habitations, si ma propriété étoit détruite & ma ruine consommée, naturellement sensible à l’injure, je ne goûterois jamais le système d’un racommodement, & ne me croirois pas lié par l’aveu que mes compatriotes y auroient donné.

Les colonies ont fait voir des dispositions si sages & tant d’obéissance à un gouvernement pris dans leur sein, que c’en est assez pour tranquilliser, sur ce point, tout homme raisonnable. Les plus timides ne peuvent alléguer, pour motif de leurs alarmes, que des prétextes ridicules & puérils, comme lorsqu’ils supposent que telle colonie prétendra la supériorité sur tel autre.

Où il n’existe point de distinctions, il ne peut y avoir de supériorité ; l’égalité parfaite ne donne point d’accès aux tentations. Toutes les républiques de l’europe sont dans une paix continuelle ; la hollande & la suisse n’ont ni guerres étrangères ni guerres intestines. Au contraire, le repos des monarchies n’est jamais durable. Au dedans, la couronne séduit toujours quelques scélérats entreprenans, & l’orgueil, l’insolence, compagnes inséparables de l’autorité des rois, amènent de fréquentes ruptures avec les puissances étrangères, pour des griefs, ou pour de simples méprises qu’un gouvernement républicain, fondé sur des principes plus naturels, arrangeroit par la voie des négociations.

Si l’indépendance des colonies est de nature à inspirer quelques craintes, c’est parce qu’on n’a pas encore arrêté de plan à cet égard. Les américains ne voient pas encore la marche qu’ils doivent suivre. Je vais donc, pour faciliter le travail, présenter mes idées particulières, tout en assurant, avec la modestie qui conviendra dans un pareil