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SA PART DANS L’ŒUVRE DU XVIIIe siècle.

s’était épris de ces idées de réaction avec l’ardeur qui l’animait dans toutes ses entreprises ; mais il y portait — il faut le reconnaître — des qualités d’ordre pratique supérieures à celles de son ami, c’est-à-dire un sens plus vif de la réalité, un coup d’œil plus juste sinon plus étendu, enfin des connaissances plus exactes et plus méthodiques.

Quelques critiques se sont plu à se figurer Vauvenargues venant au monde cinquante années plus tard et se sont demandé quel rôle il eût joué dans la Révolution. Ces sortes de questions sont très délicates et un peu vaines, car les réponses qu’on y fait laissent une place trop grande à la fantaisie et comportent trop de réserves. Et puis, l’on s’expose toujours à défigurer les personnages qui en sont l’objet, à les tirer à soi dans le sens de ses sympathies et de ses préférences.

Sainte-Beuve s’est représenté Vauvenargues sous les traits de quelqu’un des jeunes enthousiastes de la première heure dont le cœur et les mains restèrent purs, et a cru le reconnaître comme en un autre lui-même dans André Chénier, dont il rappelle, en effet, quelques traits par un mélange de hardiesse et de modération et par les qualités nobles du caractère. Mais un morceau important (le portrait du Séditieux), encore inédit lorsque Sainte-Beuve formulait cette opinion, a permis à un autre critique de l’apercevoir bien au delà