Aller au contenu

Page:Palante - Les antinomies entre l’individu et la société, Alcan, 1913.djvu/216

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
210
les antinomies entre l’individu et la société

se sont dissociées de plus en plus dans les esprits, mais elles en sont venues à s’opposer l’une à l’autre. Le droit comme idée intérieure, comme sentiment individuel et volonté de revendication personnelle s’est trouvé en conflit avec le droit comme contrainte sociale. Auguste Comte a bien exprimé l’antinomie entre ces deux façons d’entendre le droit quand il a prononcé sa fameuse condamnation du droit individuel : « L’idée du droit, dit-il, est fausse autant qu’immorale, parce qu’elle suppose l’individualité absolue. » Auguste Comte veut dire que l’idée du droit individuel est une idée antisociale parce qu’elle est un principe au nom duquel l’individu se tient en état de révolte virtuelle constante contre tout ordre social, en état de mécontentement virtuel à l’endroit de toute législation existante. — Et sans doute ces deux idées du droit : l’idée du droit social et celle du droit individuel ont des points de contact et réagissent l’une sur l’autre. Le droit comme institution sociale n’est pas sans fortifier l’idée du droit individuel, en ce sens du moins qu’on conçoit difficilement ce droit individuel désarmé et démuni de tout pouvoir de se faire respecter, pouvoir qui suppose une coercition sociale. Inversement, l’idée du droit individuel n’est pas sans influence sur le droit social ; ce dernier devient moins rigide, moins brutal et moins autoritaire à mesure que l’idée du droit individuel gagne plus de terrain dans les