Page:Palante - Précis de sociologie, 1901.djvu/12

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sciences sociales ce qu’est, d’après le positivisme, la philosophie, par rapport aux sciences particulières qu’elle systématise. Elle montrerait les relations des sciences sociales entre elles et comblerait leurs lacunes. Ce sens est déjà plus précis que le précédent. Toutefois, il n’est pas encore satisfaisant. Car on ne sépare pas suffisamment ici les phénomènes sociaux proprement dits des phénomènes ethnologiques, économiques, juridiques, politiques, etc., qui les accompagnent ou les engendrent. — De plus, la prétention de combler les lacunes de l’Économie politique, du Droit, de la Morale, etc., ne serait pas plus justifiée, de la part des sociologues, que la prétention qu’ont eue certains philosophes de combler par des hypothèses plus ou moins contestables les lacunes des sciences physiques et naturelles.

Une autre solution consiste à assigner pour objet à la Sociologie l’étude des formes sociales, abstraction faite de leur contenu. « Une armée, une famille, une Société d’actionnaires ont, quelle que soit la différence de leurs origines et de leurs fins, certains traits communs, la hiérarchie, l’interdépendance, la différenciation, etc., qui peuvent être étudiés à part. — Le seul fait que des individus s’associent produit sur eux certains effets spécifiques. Qu’il s’agisse de phénomènes économiques, ou juridiques ou moraux, ils sont soumis à l’action du milieu social[1]. » — « On pourra, dit ailleurs le même auteur, classer les différentes espèces de milieux sociaux ; on remarquera que si leurs propriétés, comme leur valeur, leur densité, la coalescence de leurs unités varient, l’action qu’ils exercent sur les individus est soumise à des variations concomitantes. On obtiendra ainsi une science où observation, classification et explication seront purement sociologiques. »

  1. Bouglé, Les Sciences sociales en Allemagne, p. 160 (Paris, F. Alcan).