Mais j’ai formé des nœuds dont le charme m’attire,
J’ai suivi trop longtemps les frivoles erreurs
D’un monde que j’aimais. L’âge a changé mes mœurs,
Aujourd’hui toute entiere à la Philosophie,
Libre des préjugés qui corrompaient ma vie,
N’existant plus enfin que pour la vérité,
Je me suis fait, Damis, une société,
Peu nombreuse, il est vrai : je vis avec des Sages,
Et j’apprends à penser en lisant leurs ouvrages :
J’ai choisi l’un d’entr’eux pour ma fille, & ce soir,
Cette heureuse union doit combler mon espoir,
C’est à vous de juger si, quoique votre amie,
Je dois vous immoler le bonheur de ma vie.
Non, pour votre bonheur je donnerais mes jours,
Et la même amitié m’inspirera toujours.
Mais quels sont donc enfin ces rares avantages
Attachés, dites-vous, au commerce des Sages.
Je ne prends point pour tels un tas de Charlatans,
Qu’on voit sur des tréteaux ameuter les passants,
Qui mettent une enseigne à leur Philosophie :
De tous ces importans ma raison se défie.
De ce vain appareil le Vulgaire est séduit.
Moi, je suis de ces gens qui font peu cas du bruit,
Et je distingue fort l’ami de la sagesse,
Du pédant qui s’enroue à la prêcher sans cesse.