Page:Palissot de Montenoy - Œuvres complètes, tome 1 - 1778.djvu/232

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veuse. Ses beaux yeux se baisserent ; mais un regard en dessous qu’elle me jetta, m’en apprit plus qu’elle ne m’en voulait cacher.

Almanzor.

Comment ?

Fatmé.

Je compris qu’elle voulait observer sur mon visage, si j’étais en effet aussi pénétrée de vos sentimens, que je semblais l’être. Je m’y connais, Seigneur Almanzor, il y avait de l’intérêt dans ce regard-là, & les mouvemens d’une femme échappent rarement aux yeux d’une autre femme.

Almanzor, avec transport.

Ah ! Fatmé, chere Fatmé ! que ne te dois-je pas ! Quoi ? Zulime !…

Fatmé.

Voilà bien les amans ! tour à tour les victimes du désespoir, ou les jouets de l’espérance.

Almanzor, vivement.

Cours, ma chère Fatmé, cours. Ose tenter avec Zulime un nouvel entretien. Prends ma bourse, ces bijoux, tout est à toi, si je peux réussir à toucher le cœur de la belle Zulime. Ne laisse point au faible intérêt qu’elle a pû te marquer pour moi, le temps de se réfroidir.