Page:Papineau - Aux honorables chevaliers, citoyens et bourgeois, les Communes du Royaume-Uni de la Grande Bretagne et d'Irlande, assemblées en Parlement, 1834.djvu/7

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mité de Votre Honorable Chambre, et qui ne représente que les opinions de quelques individus, n’est pas une autorité compétente à demander de tels changemens ; que cet Acte ne peut ni ne doit être changé, que dans les occasions où, et de la manière dont le demande le Peuple de la Province, dont cette Chambre est seule compétente à représenter les sentimens ; que toute intervention de la Législature en Angleterre, dans les Lois et la Constitution de cette Province, qui ne serait pas basée sur les vœux du Peuple librement exprimés, soit par cette Chambre, soit de toute autre manière constitutionnelle, ne saurait tendre en aucune manière à arranger aucune des difficultés qui peuvent exister dans cette Province, mais ne pourrait au contraire que les aggraver et les prolonger.

Au milieu des désordres et des souffrances que le Pays endure depuis longtemps, cette Chambre et le Peuple avaient nourri l’espoir et professé la foi que le Gouvernement de Sa Majesté en Angleterre, ne participait pas sciemment à la démoralisation politique de ses employés coloniaux : c’est avec étonnement et douleur qu’ils ont vu dans les extraits de Dépêches du Département Colonial, communiqués à cette Chambre par le Gouverneur en Chef durant la présente Session, que l’un des Membres, au moins, du Gouvernement de Sa Majesté, est animé contre eux de sentimens de prévention et d’animosité, et enclin à des projets d’oppression et de vengeance, peu propres à changer un système abusif, dont la continuation découragerait tout-à-fait le Peuple, lui enlèverait l’espoir légitime de bonheur, qu’il tire de son titre de sujets Britanniques, et le mettrait dans la dure alternative de se soumettre à un servage ignominieux, ou de voir en danger les liens qui l’unissent à la Mère-Patrie.

L’approbation par le département colonial de la composition actuelle du Conseil Législatif, dont les Actes, depuis sa prétendue réforme, ont été signalés par l’esprit de parti, et par d’odieuses distinctions et préférences nationales, est un juste sujet d’alarmes pour les sujets Canadiens de Sa Majesté en général, et en particulier pour la grande majorité d’entre eux, qui ne l’a cédé en aucun temps à aucune autre classe des habitans de cette Province, par son attachement au Gouvernement de Sa Majesté, son amour de la paix et de l’ordre, son respect pour les lois et son désir d’effectuer l’union si désirable de tout le Peuple, aux fins de jouir librement et également des droits et des avantages de sujets Anglais, et des institutions assurées et chères au Pays. Néanmoins ces distinctions et préférences, ont été presque constamment exploitées par les administrations coloniales de la Province, et la majorité des Conseillers Législatifs, Juges, et autres Fonctionnaires sous leur dépendance ; et il n’a fallu rien moins que l’esprit d’union des différentes classes du Peuple, et la conviction de l’unité de leurs intérêts, pour prévenir des collisions incompatibles avec la prospérité et la sécurité de la Province.

Votre Honorable Chambre ne peut avoir manqué d’observer que le monde politique est agité, dans ce moment, par deux grands partis en Europe, qui se montrent sous différens noms dans ses différens Pays ; sous les noms de Serviles, Royalistes, Torys, Conservatifs et autres, d’une part ; sous ceux de Libéraux, Constitutionnels, Républicains, Whigs, Réformateurs, Radicaux et autres, d’autre part ; que ce premier parti est, sur le continent Américain, sans autre poids ni influence, que ce que peuvent lui en donner ses suppôts Européens, avec un très petit nombre de personnes, qui se mettent sous leur dépendance en vue de projets personnels, et d’autres qui tiennent par l’âge ou l’habitude, à des idées qui ne sont partagées par aucune classe nombreuse ; tandis que le second parti couvre l’Amérique tout entière. Nous avons donc l’assurance d’être compris, au sujet de l’indépendance que nous désirerions voir donner au Conseil Législatif, en disant que le Secrétaire d’État de Sa Majesté se méprend, s’il pense que l’exclusion de quelques fonctionnaires salariés, suffirait pour mettre ce corps en harmonie avec les vœux, les opinions et les besoins du Peuple, tant que les Gouverneurs coloniaux conserveront la faculté de le recruter en majorité de Membres serviles par leurs antipathies contre les idées libérales.

Cette Chambre et le Peuple qu’elle représente, ne veulent ni ne prétendent menacer ; mais appuyés sur les principes des lois et de la justice, ils sont et doivent être politiquement assez forts pour n’être exposés à l’insulte d’aucun homme quel qu’il soit, et tenus de la souffrir en silence. Cette Chambre ne peut donc taire, que les extraits de Dépêches du Secrétaire Colonial, tels que communiqués à cette Chambre durant la présente Session, sont dans leur style insultans et inconsidérés, à un degré tel que nul corps constitué par loi, même pour des fins infiniment subordonnées à celles de la législation, ne pourrait ni ne devrait les tolérer ; qu’on n’en trouve aucun exemple, même de la part des moins amis des droits des Colonies d’entre ses prédécesseurs en office ; et que dans leur substance les dites Dépêches sont incompatibles avec les droits et les privilèges de cette Chambre, qui ne doivent ni être mis en question ni définis par aucun fonctionnaire, quelque élevé qu’il soit, mais qui selon que les occasions le requerront, devront être successivement promulgués, et mis en force par cette Chambre. Ceci est un sujet qui est si familier à Votre Honorable Chambre, et qui tient de si près à ses propres droits et privilèges, que Votre Honorable Chambre ne pourra que regretter avec nous que Sa Majesté ait été conseillée d’agir dans un pareil cas, ainsi qu’on le voit par l’une des dites Dépêches. Dans la circonstance à laquelle il y est fait allusion, nous avons usé d’un privilège solennellement établi par Votre Honorable Chambre, avant que le principe sur lequel il repose, fût devenu loi du Pays. Ce principe que nous avons constaté dans nos résolutions, du quinze Février,