Page:Paquin - Jules Faubert, le roi du papier, 1923.djvu/109

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Aux alentours de huit heures, tous ceux qui ne sont pas au travail, s’acheminent vers la grande place, en face des bureaux.

Il en vient de tous les coins, par toutes les rues. C’est un flot qui monte, qui monte, qui monte.

Sur le perron on a transporté une table et des chaises pour l’assemblée, organisée à l’insu des fonctionnaires principaux.

Quand l’espace de terrain fut rempli, un homme entre deux âges, respectable de figure, monte sur l’estrade improvisée.

De la main il impose le silence. La foule, près de 700 personnes, obéit. Les conversations cessent.

« — Mes amis, commence l’homme, vous savez pourquoi on est réuni ce soir. On veut avoir des salaires plus forts. Si vous voulez choisir un président on va commencer l’assemblée.

Un maçon le propose ; un autre seconde. À l’unanimité les applaudissements sanctionnent.

— Je vous remercie de cet honneur. Je vas laisser la parole à M. Luc David, un chef ouvrier, qui est avec nous autres depuis un mois.

Luc David fend la foule. C’est un colosse. Fortement charpenté, il mesure près de 6 pieds de taille. Une large mâchoire, bestiale ; un nez écrasé surmontant des lèvres épaisses ; les yeux petits ; l’un clique toujours, l’autre très vif ; le front proéminent.