Page:Paquin - Jules Faubert, le roi du papier, 1923.djvu/27

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

…Et tout à coup voilà qu’il se lève et sort en laissant sur la table sa bouteille à moitié pleine.

Le jour est énervant de chaleur. La foule va lentement. Les hommes tiennent leur chapeau à la main pour s’éponger le front. Les femmes légèrement vêtues s’arrêtent plus souvent aux vitrines. La poussière de la rue, à chaque camion qui passe, s’élève, tournoie en l’air et tombe pour, de nouveau, voltiger en rayons gris et noirs.

Malgré la chaleur, il va d’un pas rapide, sous l’empire d’une obsession.


Après s’être jeté dans le bain, où l’eau froide, fouettant son corps le fait frissonner d’un frisson qui le dégrise, il procède à sa toilette qu’il veut soignée jusque dans ses détails les plus infimes.

Un espoir surgit en lui, bien faible, suffisant pour qu’il s’y accroche comme fait le naufragé au moindre bâton flottant : que la rupture n’est pas définitive ; qu’Elle reviendra sur sa décision première.

Tout à l’heure, il va la revoir, s’emparer de son image, le graver en sa prunelle.

Il songe aux mots qu’il va dire. Il les veut caressants, il les veut tendres, il les veut autoritaires, capables de dégager une puissance mystérieuse qui convainc, qui enchaîne, qui subjugue.

Seulement il a peur de ses nerfs qu’une semaine d’orgie a détraqués.

Une inquiétude l’envahit, celle de balbutier, d’être ridicule à cause de l’émotion de sentir au