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Page:Paquin - Jules Faubert, le roi du papier, 1923.djvu/49

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C’est Henri Roberge.

Sa toilette qu’il soignait tant, est négligée ; les pantalons sans plis aucun, flous comme ceux des matelots, le nœud de la cravate à moitié fait.

Le regard terne, sans vie, ne révèle que l’abrutissement ; au bas des yeux de petites pochettes jaunes ; le coin des lèvres étiré.

En l’apercevant ainsi changé, aussi rapidement et d’une façon aussi absolue, Faubert ne peut réprimer un mouvement de surprise.

— Qu’est-ce donc qui ne va plus ?

— Tout.

— Et encore ?

— Tu te rappelles Pauline Dubois ? Tout est fini. Depuis ce temps je n’ai de goût à rien.

« Pourquoi a-t-elle rompu ? » se demande le courtier.

L’autre continue :

— Je ne vais plus au bureau. Je suis incapable de travailler, et je bois pour l’oublier. Plus je bois pire c’est. Il y a des fois où j’ai envie de me suicider.

— La belle affaire ! Ce serait une folie plus grande. Ce n’est pas une conclusion. Il n’y a aucune femme, même la plus belle, même la meilleure qui vale qu’on se tue pour elle. Et puis… une peine d’amour n’est jamais bien longue, on en revient vite.

En disant ces paroles, il songe qu’à lui aussi, malgré l’absence, malgré le temps, il arrive de souffrir… et pour la même cause…