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LA CITÉ DANS LES FERS

rêtèrent près des affiches et les commentèrent ; on gesticulait, on s’échauffait : des exclamations, des cris, s’échappaient des groupes.

Que tant de travail ait pu s’opérer, et dans quelques heures, sans éveiller l’attention des autorités donnait aux partisans de Bertrand une confiance illimitée en demain. Ils y voyaient l’indice d’une organisation solide, sûre d’elle-même, et qui agissait sans tâtonnements.

Dans le jour, l’animation et la curiosité firent place à une frénésie qui confinait à l’affolement. Des gens avaient oublié de se rendre à leur ouvrage. Ils flânaient par les rues, flairant dans l’air comme une vague odeur de poudre et de sang.

Les uns se réjouissaient, et tout leur être exaspéré, réclamait l’Action ; d’autres pétris d’une chair amorphe, s’épeuraient et poussaient des soupirs d’angoisse.

Le général Williams jubilait. Enfin, il pourrait asservir sa haine contre l’élément français. Les hommes de Barnabé le tenaient au courant des menées de la foule. D’Ottawa où il avait téléphoné le matin, on lui avait promis le secours de deux régiments de Toronto.


La lueur sourde du feu crépitant, suivie du fracas des murs qui craquaient, et des planchers qui s’écroulaient donnait un cachet de féroce grandeur à ce spectacle.